Qu’est-ce que l’Alchimie ?
Également dénommée Art d’Hermès, du nom du dieu Grec, ou Art de Musique, l’Alchimie est une Science et un Art. Elle n’a aucun point commun avec la chimie rationaliste. L’Alchimie est une philosophie, une métaphysique. C’est ce qui fit écrire au plus grand des alchimistes contemporains: « La chimie est, incontestablement, la science des faits, comme l’alchimie est celle des causes. La première, limitée au domaine matériel, s’appuie sur l’expérience; la seconde prend de préférence ses directives dans la philosophie. Si l’une a pour objet l’étude des corps naturels, l’autre tente de pénétrer le mystérieux dynamisme qui préside à leurs transformations. » (Fulcanelli – Les Demeures Philosophales – Tome1).
Ce même auteur précise : « Au surplus, il ne nous paraît pas suffisant de savoir exactement reconnaître et classer des faits ; il faut encore interroger la nature pour apprendre d’elle dans quelles conditions, et sous l’empire de quelle volonté, s’opèrent ses multiples productions. L’esprit philosophique ne saurait, en effet, se contenter d’une simple possibilité d’identification des corps ; il réclame la connaissance du secret de leur élaboration. » Contrairement au chimiste qui s’attache à l’étude de la matière inerte, l’Alchimiste dirige ses recherches vers l’animateur inconnu, agent de tant de merveilles.
Cette différence qu’établit Fulcanelli entre la science positiviste et l’alchimie on peut en retrouver l’écho sous la plume de l’un de nos plus grands auteurs populaires du XXe siècle. On peut lire sous la plume du jovial et facétieux Gaston Leroux, dans Le Mystère de la chambre jaune, cette réflexion du jeune reporter Joseph Rouletabille, évoquant le mode de travail du policier Frédéric Larsan: « J’ai cru que Fred était beaucoup plus fort que cela… Évidemment, ce n’est pas le premier venu… J’ai même eu beaucoup d’admiration pour lui quand je ne connaissais pas sa méthode de travail. Elle est déplorable… Il doit sa réputation uniquement à son habilité ; mais il manque de philosophie… ». Ce qui pourrait passer pour une coïncidence n’en est pas une, et il y aurait beaucoup à dire en ce qui concerne l’Œuvre de l’auteur du Fantôme de l’Opéra.
La seule définition valable de l’alchimie est celle qu’en donna Fulcanelli: « L’alchimie est la permutation des formes par la lumière, autrement dit le feu, ou mieux, l’Esprit. »
Demeures Philosophales :
Cette expression désigne « tout support symbolique de l’hermétique Vérité, quelles qu’en pussent être la nature et l’importance. À savoir, par exemple, le minuscule bibelot conservé sous vitrine, la pièce d’iconographie, en simple feuille ou en tableau, le monument d’architecture, qu’il soit détail, vestige, logis, château ou bien église, dans leur intégralité. »
LES ACTEURS DU DRAME ALCHIMIQUE.
* Le Sel
* Le Soufre
* Le Mercure
Les anciens admettaient que l’Homme possédait une composition trinitaire, qu’il était constitué d’un corps, d’une âme et d’un Esprit et qu’il y avait identité de nature entre la substance (la matière) et l’essence des choses (ce qui en est l’origine). Cette approche constitue la fameuse théorie de l’unité de la matière qui fut violemment combattue et ridiculisée par la science officielle, du moins jusqu’à ce que les découvertes de la physique quantique (de quanta: grains d’énergie) aient bouleversé nos conceptions de l’univers. De nos jours, les physiciens admettent que, l’origine de la matière pourrait bien résider dans la Lumière, voire dans un dynamisme vibratoire, ce qui est plus exact.
Dans ce système de pensée, l’Esprit ou essence première volatile donne naissance à l’âme, celle-ci engendrant le corps en s’y fixant. Par suite, âme et corps participent de la nature de l’Esprit. Les religions n’ont jamais enseigné autre chose. Aussi ce n’est pas sans logique que le célèbre texte connu sous le nom de Table d’Émeraude, et attribué à Hermès, affirme que: « ce qui est en haut est comme ce qui est en bas et que ce qui est en bas est comme ce qui est en haut ». Pour les anciens, il n’existait pas de différence concernant la constitution des trois règnes. Ce qui était vrai dans le règne animal -dont l’Homme-l’était nécessairement dans le domaine du végétal et du minéral, et ce qui s’appliquait à notre Terre restait vrai au niveau de l’Univers.
Le terrain d’élection des alchimistes fut exclusivement le règne minéral. Les textes hermétiques, lorsqu’ils mentionnent le Sel, le Soufre et le Mercure, n’entendent pas nous parler des corps chimiques vulgaires que nous désignons par ces noms. Ces trois mots désignent respectivement le corps, l’âme et l’Esprit des métaux. Tout l’art de l’Alchimiste, ou du Philosophe par le feu, comme on le nomme parfois, consiste à savoir fixer le volatil (faire descendre l’esprit dans le corps) et à volatiliser le fixe (spiritualiser le corps ou matière). Dans ce double processus réside tout le secret de la vie et de la mort et c’est la connaissance de ces mécanismes qui fonde l’Alchimie.
Pour autant, ce fixe et ce volatil ne se trouvent jamais, dans la réalité, séparés l’un de l’autre. Car nulle part dans l’univers on ne saurait concevoir d’esprit qui ne soit revêtu de quelque matière, aussi ténue soit-elle, pas plus que de matière qui ne renferme de l’esprit. Dans la pratique de l’Œuvre, l’agent ne se présente jamais sans le patient, ni le patient sans l’agent. Il n’est pas de mercure qui ne porte son soufre, ni de soufre qui ne soit baigné dans son mercure. Aussi n’est-il pas rare de voir dans les traités le sel porter le nom de soufre ou celui de mercure, en fonction de la phase considérée dans le processus opératif et donc de l’avancement des travaux. Là réside la première des difficultés à surmonter, comprendre ce qu’on lit!
L’ALCHIMIE… UNE AGRICULTURE CÉLESTE
Les anciens désignaient souvent l’alchimie sous le nom d’agriculture céleste -eux-mêmes se faisant appeler Laboureurs du Ciel- parce qu’elle offre dans ses lois, ses circonstances et ses conditions le plus étroit rapport avec l’agriculture terrestre. De même qu’il faut une graine afin d’obtenir un épi, de même il est indispensable d’avoir tout d’abord la semence métallique afin de multiplier le métal. Chaque fruit porte en soi sa semence, et tout corps, quel qu’il soit, possède la sienne. Le pivot de l’art consiste à savoir extraire du métal ou du minéral cette semence première. C’est la raison pour laquelle l’artiste doit, au début de son ouvrage, décomposer entièrement ce qui a été assemblé par la nature, car quiconque ignore le moyen de détruire les métaux, ignore aussi celui de les perfectionner. Telle est la raison d’être du célèbre axiome « Solve-Coagula » (dissoudre et coaguler). Cet axiome a été magnifiquement illustré, en littérature par l’écrivain Raymond Roussel (1877-1933) dans son livre Les Nouvelles Impressions d’Afrique. En effet, ce livre, étrange, Roussel le rédigea, puis il le fractionna, en partie, en cinq textes mis entre des parenthèses allant d’une parenthèse simple à des parenthèses quintuples, de façon à obtenir six textes. Puis il ajouta un septième texte par voie de notes, à charge pour le lecteur de réunir les fragments. Cet exercice de style agace encore la perplexité des exégètes. Malicieusement, Roussel avait pourtant expliqué, de son vivant que, primitivement, il avait eu l’intention de composer son livre à l’aide d’encres de couleurs différentes, mais qu’il avait dû renoncer à ce projet en raison du coût élevé de l’entreprise. Roussel étant milliardaire à l’époque, on ne peut que s’en étonner. En réalité, Raymond Roussel souhaitait attirer l’attention de ses lecteurs potentiels sur Les Sept nuances de l’Œuvre, expression qui s’appliquait tout autant à sa création littéraire qu’à l’Alchimie, dont l’un des textes les plus connus porte ce titre. Par conséquent, Les Nouvelles Impressions d’Afrique n’étaient qu’une allégorie souriante de l’Art hermétique et de son axiome. Personne ne s’en étonnera sachant que Roussel avait pour précepteur un homme qu’il surnomme, affectueusement, Volcan, dans un livre posthume, et que ledit précepteur ne fut autre que le futur signataire du Mystère des Cathédrales et des Demeures Philosophales: Fulcanelli.
Ayant obtenu les cendres du corps, celles-ci seront soumises à la calcination, qui brûlera les parties hétérogènes, adustibles, et laissera le sel central, semence incombustible et pure que la flamme ne peut vaincre. Ce sel central, les alchimistes lui ont appliqué les noms de soufre, premier agent ou or philosophique. Le soufre est la partie mâle de l’Œuvre.
Quant au Mercure, ou part femelle, il constitue la mère et la nourrice de cette semence d’où naît l’embryon. L’Œuvre commence par la recherche des moyens simples et efficaces capables d’isoler ce mercure métallique, de le purifier et d’exalter ses facultés à l’instar du paysan qui augmente la fécondité de l’humus en l’aérant fréquemment, en lui incorporant les produits organiques nécessaires. Tout l’art alchimique se résume à découvrir la semence, soufre ou noyau métallique, à la jeter dans une terre spécifique, ou mercure, puis à soumettre ces éléments au feu, selon un régime de quatre températures croissantes. Il y a un parallèle intéressant à établir entre le bain ou liquide mercuriel, engendrant l’embryon de Soufre, et le liquide amniotique au sein duquel se développe le fœtus.
Origines et supports de L’Alchimie
L’Alchimie est née en Orient et s’est répandue en Occident par les voies byzantine, méditerranéenne et hispanique. Les Arabes éducateurs des Grecs et des Perses transmirent à l’Europe la Science d’Égypte et de Babylone. Au XIIe siècle, ce furent les Croisés qui importèrent la plupart des connaissances anciennes de Palestine. Les mythologies, les religions, la sculpture, l’architecture religieuse et civile, la peinture, la littérature, les contes pour enfants, les comptines et les locutions populaires, furent autant de véhicules qui, sous le couvert d’un sens littéral, transmirent des connaissances ésotériques. Pour ce faire, les artistes utilisèrent un langage particulier basé sur les à-peu près phonétiques. Les rébus, les charades, les homophonies, les jeux de mots furent autant de moyens dont usèrent les Philosophes afin de masquer leur pensée. Ainsi qui s’est aperçu que « Peter Pan » (la Pierre Universelle) n’était qu’une allégorie d’Hermès (maître des lieux souterrains, de la mer et des airs) et de la Pierre Philosophale? De même, les contes de Ma Mère l’Oye, repris par Perrault, sont à bien entendre (oyez… oyez… disaient les anciens pour écouter) et possèdent la même fonction. Les locutions « faire du potin, du tintamarre ou un potin de tous les diables » sont les gardiennes de la Tradition alchimique et cachent l’identité du métal à utiliser. Les jeux (de l’Oie, échecs, Nain Jaune etc…) les fêtes (Galette des Rois, Chandeleur, Mardi-Gras…) sont autant de véhicules du symbolisme alchimique. En sculpture la démarche était la même et les images remplaçaient les mots.
Ainsi, un singe, sculpté sur un édifice et montrant ses fesses, désignait l’Alchimiste, celui qui singe ou imite la Nature et s’il montrait de façon impudique son « cul », c’était afin de suggérer l’anagramme « Luc »: la Lumière, celle dispensée par la Lune, terme dont le langage populaire se sert afin de désigner, justement, le postérieur… et ses deux quartiers! Si la façade des Cathédrales affecte la forme graphique de la lettre H c’est pour le même motif. En effet, il s’agit de l’initiale de Hélios (le soleil) et de Héllé (la déesse Lune des grecs archaïques). Toute faute de gravure ou objet pointé du doigt par un personnage étaient destinés à attirer l’attention du visiteur sur le caractère symbolique de l’oeuvre nécessitant une lecture différente. Les monuments ou même les objets comportant un message de nature alchimique sont dits être des « Demeures Philosophales ». Les reconnaître est aisé, dès lors qu’ils sont accompagnés de l’objet suivant:
Ce ruban, ou listel est un phylactère, un ornement dont l’équivalent grec a le sens de « garder, préserver, conserver », car sa fonction est de protéger le sens occulte de la composition qu’il accompagne. De même, cette figure losangée, ou rhombe, est souvent l’indice qu’il vaut mieux se méfier. En effet, le mot qui, en grec, désigne un rhombe, visible sur la cheminée du château de la famille d’Estissac -les protecteurs de Rabelais dont toute l’œuvre possède un caractère alchimique- a le sens de « se tromper, s’égarer, tourner autour de ». Dans le domaine de la littérature populaire, même au XXe siècle, nous retrouvons d’amusantes allégories. Ainsi, comme nous l’avions déjà donné à entendre, Arsène Lupin, par exemple, gentleman-cambrioleur force les portes les plus hermétiquement closes, tout comme les cœurs féminins, et toujours avec « Esprit ». Quoi de plus normal puisqu’il est une image du « Mercure » qui, comme lui, est insaisissable et change de formes et de noms à volonté? Et, d’ailleurs, le dieu grec Hermès, devenu le Dieu Mercure des Romains, n’est-il pas le patron des voleurs? On notera, avec amusement que le prénom de Lupin, Arsène, est proche phonétiquement de Larsan, personnage de Gaston Leroux, policier et meurtrier. Larsan et Arsène désignent le mâle, l’Homme. Si Leroux appela ainsi son criminel, c’est afin de rappeler ce que disent les Alchimistes des métaux, à savoir que ces derniers, dans la mine, « ont été tués par l’industrie humaine ». Nous verrons ultérieurement que Le Mystère de la Chambre Jaune n’est pas seulement une énigme policière visant à expliciter comment l’assassin s’y est pris afin d’entrer, puis de sortir d’une pièce hermétiquement close… ce qui se montre déjà très allusif de l’Alchimie.
Si Arsène Lupin symbolise le Mercure alchimique de L’Œuvre, qualifié de blanc, les personnages de Gaston Leroux « souffrent » tous parce qu’il en fit des allégories du « Soufre », acteur de l’Œuvre au rouge.
Sur un plan technologique, le Théâtre d’Ombres du célèbre cabaret Montmartrois Le Chat Noir (1881-1897), cabaret qui fut fondé par l’Alchimiste Fulcanelli et ses amis, tous membres du gotha artistique, politique et industriel de l’époque, ainsi que le cinématographe des frères Lumière, reposent sur le principe de « la permutation des formes par la lumière », dont nous avons dit qu’il s’agit de la définition exacte de l’Alchimie.
La transmutation des métaux en or est-elle possible?
La réponse est oui, bien qu’elle soit de peu d’intérêt et ne soit pas le but recherché. En fait il s’agit d’un simple test destiné à prouver que l’Alchimiste est sur la bonne voie, celle qui mène à l’obtention de la Pierre Philosophale qui lui permettra d’accéder à « une forme d’immortalité » et non à l’immortalité physique. La transmutation en argent ou en or des métaux (étain, plomb…) se réalise à l’aide de deux sortes de poudres dites de « projection ». L’or obtenu est à 24 carats, mais plus pur que l’or en circulation, ce dernier comportant des impuretés, ce qui n’est pas le cas de l’or alchimique. Au début du XXe siècle, un alchimiste français se présenta à l’Hôtel de la Monnaie afin de vendre sa production (76 kilos d’or alchimique). L’Administration se saisit de cet or au prétexte qu’il était interdit de savoir le fabriquer. L’affaire fit quelque bruit. Outre ce fait, les preuves matérielles et historiques de transmutations effectuées et réussies abondent.
Des pièces obtenues à partir d’or alchimique ont été reproduites dans la « Revue Numismatique » de 1867. Lesdites pièces furent frappées chez le Landgrave de Hesse et à la cour du Roi de Suède Gustave-Adolphe. En 1648, à Prague, le Roi Ferdinand III assista à une transmutation et fit frapper une médaille avec l’or obtenu. Il existe de nombreuses autres pièces et médailles de ce type. La preuve la plus éclatante de l’authenticité des transmutations est de nature juridique. Au XVIIIe siècle, Lascaris, pourchassé, trouva refuge au château de la comtesse Anne-Sophie d’Erbach. Afin de remercier la Dame, Lascaris proposa de transmuter sa vaisselle d’argent en or. Lascaris transmuta une vieille bassine. Le lingot obtenu fut analysé par un orfèvre et reconnu comme étant bien de l’or. La Comtesse confia toute sa vaisselle laquelle fut transmutée d’argent en or. L’affaire eut des suites. La Comtesse vivait séparée de son époux Frédéric-Charles, or ce dernier ayant appris l’histoire de cette transmutation, réclama sa part au prétexte qu’il s’agissait d’une augmentation du capital familial. Il fut débouté par arrêt du Tribunal de Leipzig, en 1733 (Putonei, Enunciata et consilia juris Leipsiae, 1733).
Quant à la recherche de « l’Immortalité » la place nous manque pour en traiter, d’autant que pour comprendre, il nous faudrait rédiger de longs développements concernant les relations entre la philosophie fondamentale du Bouddhisme d’origine, selon laquelle le « monde est illusion », et le nouveau credo de la physique, laquelle reconnaît que la matière n’existe pas en tant que telle, qu’elle est « un comportement sensible, un événement devenu tangible », autrement dit qu’elle est virtuelle et en perpétuel devenir. Ce propos n’est pas sans résonance avec un film américain, devenu déjà culte: Matrix (la Matrice). Ceci trouve un écho curieux avec le fait que l’Alchimiste cherche à réaliser l’union de la lumière et de la matière et que, pour ce faire, il commence par préparer la « matrice » que constitue ladite matière. « L’immortalité » en question doit se concevoir comme une traversée du « miroir des apparences », ainsi que suggéré par Jean Cocteau dans « Orphée ».
L’Alchimie est-elle catholique ?
Le terme catholique possédant l’acception d’universelle, l’alchimie est effectivement catholique. Pour autant, il serait téméraire de vouloir la subordonner au dogme de l’Église et ce serait mettre la charrue avant les bœufs! Il est probable que les Alchimistes, héritiers de la Gnose d’Alexandrie, n’ignoraient rien des conditions douteuses qui présidèrent à l’apparition des dogmes chrétiens. Ils usèrent de l’hagiographie chrétienne comme ils l’avaient fait de la mythologie et du panthéon païen, afin d’illustrer leurs propos.
Contrairement à ce que voudraient donner à entendre certains milieux officiels, les cathédrales et les églises ne sont pas uniquement des lieux voués exclusivement au culte. Le caractère profane de l’inspiration des lapicides qui en exécutèrent la statuaire suffirait à démontrer l’inanité d’une telle thèse. Ce furent les Frimasons ou Francs-Maçons du moyen-âge qui édifièrent les chefs-d’œuvre du Gothique, encore dénommé Art Ogival. L’Art Gothique ne doit rien aux Goths, il est expression de l’argotique ou de l’art goétique. Les Frimasons étaient des argotiers ou argo-nautes et usaient du langage parlé sur le navire Argo, vaisseau (mot ayant anciennement aussi le sens de vase) menant Jason à la conquête de la Toison d’Or. Ce mythe n’est, au demeurant, qu’une allégorie expressive et naïve de l’une des voies alchimiques, celle qualifiée d’humide, par opposition à la voie dite sèche. Cette langue, était la Langue Verte: l’Argot, le langage des initiés, la cabale phonétique, le petit langage des enfants, le pun, la langue du cheval de Jonathan Swift, le gay-savoir, le lanternois, la gaye-science de Rabelais, le jobelin, le coquillard de François Villon, la Langue des Oiseaux, ou des oisons, selon la forme ancienne, à l’époque de Marie de France, expression à entendre, en franglais: oie-sons… les Fils de l’Oie. L’art gothique est l’art .. (cot), mot grec signifiant lumière. Par suite, le Gothique est l’art de la lumière ou de l’Esprit. Par suite, il n’est pas étonnant de constater que les monuments religieux soient des pendants de l’architecture civile et aient servi de supports au symbolisme hermétique et alchimique. Les églises et cathédrales nous parlent moins la Langue des grenouilles de bénitier, que la Langue des Oiseaux.
Les fondements du christianisme
Les faits rapportés comme historiques par les religions ne sont pas plus authentiques que ceux mentionnés au sein des mythologies et, à ce titre, sont loin d’avoir valeur de paroles d’évangiles. Concernant le christianisme, il est bon de rappeler, en bref et sans vouloir être polémique, les faits suivants:
Après la défaite de Juda-bar-Juda, fils de Juda le Gaulonite, Messie (messiah en hébreu et christos en grec) historique, c’est-à-dire oint ou consacré et descendant de David, prétendant légitime au trône d’Israël, la nation juive vit ses espérances décliner. En 70, Titus pille Jérusalem. La rébellion va gronder une dernière fois, menée par Bar Kocheba (le fils del’Étoile… celle mentionnée comme étant radiante qui se trouve associée au rejeton de la race de David, par le Christ chrétien -ce qui est pour le moins troublant et inexplicable si l’on use d’une lecture littérale- au sein de l’Apocalypse du pseudo Jean. C’est que contrairement à ce que l’on nous en dit aujourd’hui, ce texte n’a jamais été un livre prophétique. Il s’agissait d’un manifeste guerrier et politique prêché à l’encontre des gentils ou non-juifs dès le premier siècle. Ce texte, qui n’existe pas encore imprimé -il ne le sera qu’un siècle plus tard- est en fait le tout premier livre du canon catholique connu sous la dénomination de Nouveau Testament. Croire qu’il s’agit du dernier livre prouve une méconnaissance totale des hébreux et de l’histoire de cette période. En effet chacun sait que les juifs écrivent de droite à gauche, contrairement à nous, et qu’ils classent de même, à l’envers. Par conséquent, ce qui est le premier texte pour nous, s’avère être le dernier pour un lecteur hébraïque; ceci se vérifie dans la version juive de l’Ancien Testament, puisque la Genèse en est le dernier passage et non le premier.
Bar Kocheba était le petit-fils de Juda-bar-Juda, le prétendant au trône, crucifié par les romains à l’âge de cinquante ans. En 135, l’Empereur Hadrien passe la charrue sur Jérusalem, rasant la cité. La révolte juive est définitivement éteinte…
Dans les premiers siècles, la Palestine devient la plus grosse entreprise de fabrication de faux en matière de religion. Petit à petit sont fabriqués l’Apocalypse (IIe siècle), à partir des Cinq Livres du Rabbi ou Commentaires de Papias, puis les Lettres et Actes des Apôtres. Saül, persécuteur des Christiens (et non chrétiens, il s’agit d’une secte juive nationaliste) est transformé en Paul, par falsifications successives des scripteurs -suppression du tréma et remplacement du “S“ par un “P“- afin d’occidentaliser son nom. L’évangile selon Jean est rédigé à partir de l’évangile gnostique de Cérinthe et des textes d’Hermès. Trois autres évangiles sont fabriqués, entre les IVe et VIe siècles, les synoptiques (évangiles se recoupant) qui, en fait ont été synoptisés… ce qui n’est pas tout à fait la même chose! Ces textes seront censurés, manipulés, sujets à des interpolations postérieures et tardives. Ces manipulations suffisent à expliquer qu’aucun manuscrit des évangiles, dits canoniques, formant le Nouveau Testament, ne puisse être présenté qui soit antérieur au IVe siècle.
Tous les Pères de l’Église furent des auteurs juifs, écrivant en grec, à destination d’un public juif, dans un esprit juif. Ils portaient tous des noms juifs, mis plus tard à la mode occidentale. Les preuves de cette supercherie abondent. Concernant les faux en écriture dont il vient d’être question, l’une des meilleures preuves de cette assertion nous est fournie par l’un des Pères de l’Église et non des moindres .Ainsi, Eusèbe (IVe siècle) mentionnant Irénée (IIe siècle) indique que ce dernier tenait des disciples que le Christ « avait prêché jusqu’à sa cinquantième année »!!!? Au IVe siècle, les Pères de l’Église ignoraient donc que le Jésus des Évangiles était mort à trente-trois ans!
Dans le même ordre d’idées, comment expliquer que le pseudo Jean, après avoir été martyrisé, se soit échappé par la Porte Latine et ce au 1er siècle, alors qu’elle ne fut construite qu’au IIIe ? Ceci suffirait à prouver l’invention tardive de cette fable.
Le Jésus des Évangiles fut « incorporé » tardivement à l’Eon (l’Esprit) des gnostiques, puis fut divisé en plusieurs personnages, tous aussi fictifs: St Jean, dit le Baptiste, St Jean l’Apôtre, St Jean auteur de l’Apocalypse. Là aussi, les preuves abondent, pour ceux qui savent lire, qui ne s’arrêtent pas à la lettre et ne se contentent pas d’idées reçues ou fabriquées…
Au-delà de ces mystifications littéraires sur ce Jésus, ou Juda de chair, fut greffé l’éternel mythe luno-solaire, puis le symbolisme alchimique transfuge des mythologie de Sumer, de Babylone, d’Égypte, de Grèce et de Rome. Le mythe chrétien étant plus linéaire, ne comportant plus un panthéon de dieux et de déesses multiples, localisé dans l’espace et dans le temps, devint un exposé hermétique simplifié.
Richard Khaitzine
Retrouvez les travaux de Richard Richard Khaitzine sur son blog.
P.S.: en complément d’infos, voici le point de vue de Richard Khaitzine concernant l’alchimie, exposée lors d’une conférence (avril 2009).
Franck Balmary.